Du bois dont sont faites les notes

Du bois dont sont faites les notes

Dans son atelier de Lausanne, la luthière Esther Bornand se met au diapason avec les musiciens qui lui confient leurs instruments. Entre ses mains expertes, violons, altos et violoncelles résonnent d’un son nouveau.

Officiellement, elle est « Maître luthier ». Mais Esther Bornand préfère qu’on l’appelle luthière, un mot que l’on commence tout juste à féminiser tant la lutherie est longtemps restée l’apanage des hommes.

Cette artisane fut d’ailleurs la première Suissesse à exercer cette profession après avoir obtenu son CFC, en 1997, complété par une Maîtrise fédérale, en 2002. A Lausanne, son adresse est connue depuis 12 ans des musiciens du quatuor classique qui font appel à son savoir-faire pour entretenir ou restaurer leurs instruments. Dans son atelier, la précision du geste artisanal donne le « la » pour offrir une nouvelle jeunesse aux violons, altos et violoncelles qui lui sont confiés.

Pour Esther, c’est par la musique que tout a commencé. Violoniste dès l’âge de 7 ans, elle s’est tournée vers un apprentissage en lutherie après le gymnase. « Ça me paraissait plus raisonnable d’apprendre à construire un violon que de jouer au niveau auquel j’aspirais, sourit-elle. Et puis, être sur scène n’avait rien de très évident pour moi ». C’est dans les coulisses de la musique qu’elle a trouvé sa voie, tout en continuant à pratiquer le violon à ses heures perdues. « Tous les luthiers ne sont pas musiciens mais pour moi, c’est indispensable, raconte-t-elle. Cela me permet de bien comprendre les attentes des musiciens. Avant un entretien ou une restauration, on doit se mettre au diapason. »

Au quotidien, Esther travaille sur plusieurs instruments à la fois. A l’aide d’outils spécifiques – lousse, canif, pointe aux âmes, gouge, elle rénove et répare, sculpte, rabote et colle chaque élément avec « patience et un goût du détail très prononcé ». Sur tel violon, il s’agira de remplacer le chevalet, cette pièce d’érable qui soutient les cordes, ou de vérifier l’âme de l’instrument, ce petit cylindre en épicéa dissimulé à l’intérieur du violon mais essentiel pour la transmission des sons. Sur cet alto, il faudra raboter la touche usée par les doigts du musicien. Sur ce violoncelle, il s’agira d’un simple nettoyage, peut-être un nouveau vernis à appliquer sur la table, le fond, les éclisses, le manche et la tête sculptée en volute. Une cure de jouvence pour « ces instruments qui vivent et évoluent avec le temps » et dont la luthière éprouve un plaisir infini à prolonger la vie. Pour la beauté du geste et de la musique.

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EN CHIFFRES

2

L’épicéa et l’érable sont les deux essences de bois servant à fabriquer un violon

10

Le nombre minimum d’années de séchage pour le bois d’un futur violon

71

Le nombre de pièces dont est constitué le violon

200

Le nombre d’heures de travail pour créer un violon

3160

En hertz, la hauteur de son maximale d’un violon

1550

L’année de naissance des premiers violons

LEXIQUE

TABLE D’HARMONIE
Il s’agit de la pièce d’épicéa qui forme le dessus du violon. C’est la partie de l’instrument qui vibre le plus, comme la peau d’un tambour. Selon la voûte et l’épaisseur de cette pièce, l’instrument résonnera différemment.

CHEVALET
Cette pièce d’érable ajustée et posée sur la table du violon soutient les 4 cordes de l’instrument et ne tient que par pression.

ÂME
Ce petit cylindre d’épicéa est coincé entre les tables et sert à la fois de transmetteur au son et de soutien de la pression des cordes.

OUÏES OU FF
Ces deux ouvertures symétriques placées sur la face de la table d’harmonie du violon permettent à l’air de sortir du corps de l’instrument.

ANTONIO STRADIVARIUS
Il est certainement le luthier le plus estimé et le plus connu au monde. On dit familièrement un « Strad » en parlant de ses violons

VOLUTE
Ce terme désigne la tête de l’instrument taillée en forme de spirale. C’est la seule pièce dont la forme pourrait être modifiée sans altérer le son du violon.

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