Le souvenir est de ceux qui vous marquent profondément. Gilbert Meylan a 6 ans et il arbore fièrement une Reverso de Jaeger-LeCoultre qui ne lui appartient pas. « Je la trouvais vraiment très belle, raconte-t-il. Elle était là, dans un tiroir de l’atelier de mon père, alors je l’ai prise. Quand il s’en est aperçu, j’ai pris une énorme claque . » Difficile de savoir ce qui l’a le plus marqué. La réprimande ou la montre ? Un point est sûr pourtant : certaines choses ne s’enseignent pas. Elles se transmettent naturellement, de père en fils, au fil des générations.

Le temps devant lui

La passion de l’horlogerie, Gilbert l’a reçue en héritage. « Mon grand-père, John-Henri, était horloger à l’établi, raconte-t-il. Il travaillait pour des manufactures comme Audemars Piguet. Mon père, Richard, avait un petit magasin de réparation et de vente de montres et porcelaines au Brassus, accolé à notre maison familiale. » L’exemple fait foi et, au coeur de cette vallée où l’horlogerie se pratique religieusement, l’entrée de Gilbert à l’Ecole d’Horlogerie en 1945 n’est que la suite logique de l’histoire. Il se spécialise comme faiseur d’étampes et, au bout de quatre ans, reçoit son diplôme avec les honneurs. Nous sommes en 1948, Gilbert fête ses 20 printemps, il a la vie devant lui et de l’énergie à revendre.
Après une année à Grenchen, dans le canton de Soleure, où il exerce son métier de faiseur d’étampes, sa rencontre avec Paulette Guignard change la donne. « Paulette était la petite-fille du fondateur de la société Golay-Buchel spécialisée dans les grenats, les pièces détachées et l’outillage d’horlogerie, explique Gilbert Meylan. Je suis tombé follement amoureux. Après des séjours en Angleterre et en Allemagne, je suis entré dans la société en 1951. » Il y restera jusqu’à la retraite, en 1994, gravissant les échelons un à un pour finalement devenir responsable des exportations de pièces détachées et d’outillage pour l’horlogerie et la bijouterie.

L’horlogerie dans le sang

La passion ne se commande pas. Enfant, Gilbert a attentivement observé son père, ses gestes minutieux, sa patience et son savoir-faire. Adulte, il s’est laissé surprendre par la dextérité manuelle de son fils, par « son adresse diabolique ». Aujourd’hui, il se dit « enthousiasmé et béat d’admiration devant ce que Lionel, Julien et Yannick ont accompli ». De père en fils, « l’horlogerie est inoculée dans notre sang. » La passion se transmet de génération en génération, comme un relais, un fil tendu et ponctué d’anecdotes : étudiant à l’Ecole d’horlogerie, Julien a vécu quelques années dans la maison familiale du Brassus. Sa chambre n’était autre que l’ancien atelier d’horlogerie de Richard Meylan.
A cette pensée, Gilbert a le sourire.

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De gauche à droite :Lionel, Lucie (grand-mère paternelle de Lionel), Richard (grand-père paternel), Paulette (mère de Lionel) et Lise Meylan (soeur aînée de Lionel)